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Propriétaire et propriété immobilière

Comment devenir propriétaire par prescription acquisitive ?

La prescription acquisitive : comment devenir propriétaire d’un bien immobilier par l’écoulement du temps ?

La prescription acquisitive, ou usucapion, est un mécanisme juridique ancien qui permet à une personne de devenir propriétaire d’un bien immobilier par la simple occupation continue de ce bien pendant une certaine durée. Prévue par le Code civil français, cette disposition repose sur l’idée que le temps peut consolider une situation de fait en une situation de droit. Ainsi, même sans acte de vente ou titre de propriété, une personne peut revendiquer la propriété d’un immeuble si elle réunit un certain nombre de conditions et que le véritable propriétaire n’a pas réagi pendant la durée impartie. Cette procédure, bien que méconnue du grand public, peut être un outil redoutable pour régulariser une occupation irrégulière ou pour récupérer un bien dont le titre a été perdu. Encore faut-il savoir comment l’utiliser à bon escient et s’en protéger.

 

Quelles sont les conditions de la prescription acquisitive ?

Pour faire valoir une prescription acquisitive, quatre conditions cumulatives doivent être respectées. Elles sont détaillées aux articles 2255 et suivants du Code civil.

Une possession continue et non interrompue

Le preneur doit occuper le bien sans interruption pendant toute la durée exigée. En général, cette durée est de 30 ans (prescription trentenaire), mais elle peut être réduite à 10 ans si le possesseur détient un titre (acte de vente, testament, etc.) et est de bonne foi. La continuité implique qu’il ne doit pas y avoir de cession de la possession ou d’intervention du propriétaire initial rompant l’occupation.

Une possession paisible

La possession ne doit pas résulter d’un acte de violence. Une installation par effraction, par menace ou par intimidation ne peut pas donner lieu à une prescription acquisitive. Le possesseur doit user du bien comme le ferait un propriétaire normal, sans opposition manifeste de la part du propriétaire légitime.

Une possession publique et non clandestine

Le possesseur doit occuper le bien de manière visible. Il ne doit pas se cacher ou agir en cachette. Par exemple, il entretient le terrain, y bâtit une construction, y installe des panneaux ou y perçoit des revenus (loyers) sans dissimulation. Cela permet aux tiers et au véritable propriétaire d’être informés de cette possession.

Une possession à titre de propriétaire

L’occupant doit se comporter comme s’il était le véritable propriétaire. Cela signifie, par exemple, qu’il paie les taxes foncières, réalise des travaux d’entretien, engage des démarches administratives ou revendique son droit en justice. Il ne doit pas être toléré ou autorisé à rester sur le bien par le propriétaire (par exemple en vertu d’un prêt ou d’un bail).

prescritpion acquisitive - usucapion

Se défendre contre ou faire valoir une prescription acquisitive

 

Comment faire valoir une prescription acquisitive ?

Pour faire reconnaître la prescription acquisitive, il faut saisir le tribunal judiciaire du lieu où se situe le bien. L’action est dite « d’acquisition de la propriété par prescription ». Le juge étudiera les preuves apportées pour vérifier que les conditions sont remplies. Il est indispensable de constituer un dossier solide comprenant :

  • des témoignages de voisins ou d’anciens propriétaires ;
  • des quittances de taxes foncières ou d’assurance ;
  • des photographies ou plans cadastraux ;
  • des attestations de notaire ;
  • des actes constatant la possession (actes de vente précédents, échanges de correspondance, etc.).

Une fois la prescription reconnue judiciairement, le jugement permet de faire inscrire l’acquisition au service de la publicité foncière.

Comment éviter ou interrompre une prescription acquisitive ?

Pour un propriétaire souhaitant conserver ses droits, plusieurs mécanismes permettent d’interrompre la prescription acquisitive :

  • La reconnaissance explicite ou implicite de la propriété (ex : conclusion d’un bail ou demande d’autorisation);
  • L’assignation en expulsion ou l’introduction d’une action en revendication de propriété;
  • Une lettre recommandée avec accusé de réception s’opposant à la prétendue possession;
  • L’intervention d’un huissier ou le constat d’un acte manifeste d’opposition.

Il est crucial de surveiller ses biens, notamment les terrains isolés ou inoccupés, de faire des visites régulières et de conserver les preuves d’occupation ou d’entretien par le propriétaire.

 

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Applications pratiques et stratégiques de la prescription acquisitive

Au-delà des aspects juridiques, la prescription acquisitive pose des enjeux importants dans la gestion du patrimoine immobilier, qu’il s’agisse de régulariser des situations anciennes ou de se protéger de réclamations futures.

Exemples d’usages de la prescription acquisitive

Dans la pratique, la prescription acquisitive est fréquemment utilisée dans les cas suivants :

  • Un héritier occupant depuis des décennies un bien sans que la succession ait été réglée officiellement ;
  • Un agriculteur exploitant une parcelle de manière exclusive, croyant à tort être propriétaire ;
  • Un voisin ayant empiété sur le terrain contigu avec une construction ou une extension ;
  • L’occupant d’une maison abandonnée, qui l’a rénovée et entretenue pendant des années ;
  • Un acquéreur sans titre de propriété, à la suite d’un acte irrégulier, mais qui occupe les lieux comme propriétaire.

Dans ces situations, la prescription permet de régulariser une situation qui, bien que hors cadre légal initialement, correspond à une occupation effective, ancienne et incontestée.

Risques et précautions pour les propriétaires

Pour éviter qu’un tiers ne devienne propriétaire d’un bien par prescription, il est essentiel que les propriétaires fonciers :

  • Mettent à jour les titres de propriété et régularisent les successions ;
  • Protègent leurs terrains par des clôtures, des panneaux, ou une occupation effective ;
  • Rédigent des conventions d’occupation écrites (prêt, bail, autorisation) ;
  • Effectuent des visites et des constats réguliers ;
  • Réagissent dès qu’une occupation est suspecte ou prolongée.

En matière de gestion de patrimoine ou de succession, la prescription acquisitive peut être une solution pour reconstituer un titre ou faire valider une situation ancienne. Elle peut également constituer un danger réel pour un propriétaire désintéressé ou désorganisé.

prescription acquisitive - usucapion

En bref

La prescription acquisitive est un outil juridique puissant, mais strictement encadré. Elle permet de régulariser des situations anciennes et de faire valoir un droit de propriété sans titre formel, à condition de remplir toutes les conditions exigées par la loi. Inversement, elle impose aux propriétaires une vigilance permanente sur leurs biens, surtout lorsqu’ils ne sont pas occupés de manière régulière. En cas de doute, il est toujours recommandé de consulter un avocat ou un expert en évaluation immobilière pour éviter des litiges à long terme ou pour faire valoir ses droits dans le cadre d’une prescription en cours.

FAQ – Prescription acquisitive – Usucapion

 

Une action en prescription acquisitive peut-elle être contestée par les héritiers d’un propriétaire ?

Oui, les héritiers d’un propriétaire peuvent contester une prescription acquisitive engagée par un tiers. Ils devront prouver que la possession n’était ni paisible, ni publique, ou qu’elle s’est exercée avec leur autorisation, ce qui exclurait l’usucapion.


Est-il possible d’interrompre le délai de la prescription trentenaire ?

Oui. Le délai de prescription trentenaire peut être interrompu par une reconnaissance de droit du propriétaire ou par une action en justice (assignation, commandement de payer…). Dans ce cas, un nouveau délai repart à zéro.


La prescription trentenaire s’applique-t-elle uniquement aux biens immobiliers ?

Principalement, oui. La prescription trentenaire est spécifiquement prévue pour les biens immobiliers non régis par un acte de propriété (comme un titre notarié). Pour les meubles, d’autres régimes de possession s’appliquent, souvent plus courts.


Un locataire peut-il acquérir un bien par prescription trentenaire ?

En principe, non. La possession du locataire est présumée exercée pour le compte du propriétaire, donc non équivoque. Pour prétendre à la prescription acquisitive, il faudrait démontrer un changement de comportement clair et non contesté.


Le bornage ou un relevé topographique peut-il empêcher la prescription acquisitive ?

Pas systématiquement. Un bornage ou un relevé topographique ne suffit pas à faire obstacle à la prescription si le possesseur agit comme propriétaire et que cette possession n’est pas contestée pendant 30 ans. Mais ces documents peuvent servir d’éléments de preuve en cas de litige.


La prescription trentenaire peut-elle s’appliquer en copropriété ?

Oui, mais avec prudence. Un copropriétaire qui utiliserait une partie commune à titre privatif pourrait, sous certaines conditions et après 30 ans de possession continue, demander la prescription. Cela suppose une appropriation visible, paisible et non contestée.

Alicia Grau Expert immobilier haussmann évaluation
Alicia GRAU

Directrice Générale Haussmann Evaluation

Expert immobilier

Expert agréé CEIF

Expert agréé SNPI

Expert accrédité TEGOVA

Membre de la Chambre des Experts Immobiliers de France (CEIF)

Membre du collège des experts immobiliers (SNPI)

Master 2 en droit immobilier de l’Université Jean Moulin Lyon III

Spécialisation « estimation des immeubles » à l’ICH